Le Centre de Flammes (Avant-propos)

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(Nous publions dessous l’intégralité de l’avant-propos à l’ouvrage Le Centre de Flammes disponible l’achat ici )

 

 

Je préviens. J’ai longtemps, comme dirait U’tansi, joué à l’effacement. Et il n’est plus temps d’être modeste.

 

C’est l’automne 2000, qu’après avoir mené moi aussi la fastidieuse bataille du visa, je me retrouvai immigré en France. Rendu là pour initialement des études en design industriel puis ensuite, selon les vicissitudes des inscriptions, selon où me mena l’ivresse surtout… et les perspectives en permanence étendues, toute la volupté à embrasser, alternativement : architecture, histoire de l’art ou encore anthropologie… ; Je finis très vite à la rue. J’eus le don de m’y maintenir avec une parfaite constance une décennie entière.

Je connus ainsi les prestigieuses académies et entrai en exigence intellectuelle, pauvre hère à Paris. 

La poésie que je découvrais aussi fut pour me tourner cette expérience, sublime. Et donc quelque part me la rendre plus supportable flattant certainement une soif d’absolu qui par certains aspects devait définir ma personne. M’y enfermant aussi sûrement. 

Il n’y avait vraiment que cela à faire dans ma situation : me complaire, dès lors que je m’étais déclaré poète, d’être cloche. Effet irrémédiablement péyotl… Ces états-là peuvent durer…

Or ma mère réclamait des nouvelles. 

La Maternelle mienne, incroyable. Réserve littéralement jamais épuisée d’espoir qui m’était renouvelée à chaque coup de fil… Seul point, la Maternelle, d’arrimage dans cette pureté irresponsable de la déréliction quand elle confine à l’errance. Avec “ Coltan ” aussi, un joli prénom de petite fille découvert dans la relative opacité…, entrevu au Futur, au travers l’épais brouillard.

 

De l’errance, j’ai conçu – un chantier trop ambitieux jamais achevé après l’autre – un recueil : ” Girations ” ! Une adresse à ma mère. Un testament en réalité. Une somme poétique en façon d’odyssée rigoureusement hachée d’un anthologie de circonstance. Quelquechose érectile. Quelquechose où je pouvais dire, moi aussi que j’ai eu soin de ma parole. Où, cette chose, comme moi alors, ça tourne à l’envie… 

 

Cette traversée particulière des toutes premières années du millénaire où je restitue de pathétiques prises de consciences nouvelles : Girations, fut refusé partout. 

Six cent pages d’une poésie qui en aucun endroit ne s’amuse… 

Refusé ! 

Les « maisons » auxquelles, aux quatre coins de Paris, je portais justement la chose semblaient toutes considérer qu’il ne devait plus y avoir de poètes. Certaines mêmes répugnant assez ouvertement à mon apparence – barbu à vingts – comme pour m’emmener à  convenir d’une raison tout à fait légitime là de n’avoir pas même à jouer le jeu de me prendre l’ouvrage « seulement pour voir… » avec les avertissements qu’ on ne me garantissait absolument rien « hein ! » et les « Sachez, hein, que nous sommes submergés de manuscrits, hein !», « De la poésie ? Heu… On  fait très peu hein ! », « Nos délais peuvent être extrêmement long hein !… » Etc, « hein ! »

Je m’en allais…

 

Mon désir de reconnaissance cependant était si fort alors que j’en éprouvai forcément une peine terrible qui finit tout à fait d’obscurcir ma perspective. J’aurais pu sombrer. 

C’est un petit garçon d’abord qui me sauva la vie. Son arrivée surprise marque la fin de ma dérive parfaite. 

 

*

 

Écrit en 2009 pour servir de prologue à Girations, Le Centre de Flammes est ce point lancinant où est cristallisé mon dépit ; à la fois situé rigoureusement et imprécis, isolé et participant de presque tout, d’origine de toutes choses chez moi illuminées. 

J’y amorçai, je crois, la façon mienne particulière de Retour au Pays Natal… Procédant d’une toute aussi vertigineuse et très personnelle exaltation qui, je m’en rends compte aujourd’hui, m’entraîna halluciné jusqu’au Bout d’une Nuit de fièvre tour à tour esthétique et politique. Je tentais ainsi d’autoriser la consumation d’être totale. Sachant que le feu ne mangerait que ma part mauvaise…

Promis à l’autre rive, je me transmuterai moi-même en nautonier. Le lecteur est quelque impétrant désormais que j’embarque sur ce long poème libre. Je suis bientôt définitivement son Charon au lecteur. 

Je l’apostrophe là franchement. D’autor je le tarabuste. Cela a à chaque fois dans la cours du conte l’effet d’une tranche franche à la rame. 

C’est du lambeau de Styx, mon texte… Limbes persistants intermittents !

Avançant comme à tâtons dans le noir, il témoigne confusément de « Neufs Saisons » en l’enfer d’Occident. Autant de cercles à briser. Aussi, entend-t-il, ce poème, en même temps, signer la fin imminente susurrée en supplique ou rabattu avec la force de l’incantation, d’un irrémédiable cycle d’errance. 

C’est, j’espère, pris au collet par cette scansion, le Jugement même de Dieu peut-être : ma si particulière condition d’exilé, ainsi conjuré. 

Le geste ici, quasi cathartique, est définitivement celui de s’estomper l’obscurité grasse… Triturer les entrailles, délayer le purin… M’esquisser un horizon.

 

Mes tutélaires se devinent : Césaire, Céline, Rimbaud, Artaud… Leur commune colère où se mire si parfaitement la mienne me tint chaud aux jours d’hiver. (Complètement assumés dans le texte). Ah oui, pas du tout de lamanièrede. Ca sortait juste pareil qu’eux, ça venait sans l’effort ! Mais tellement directement mien. Si outrageusement mien.

Tellement mien je le sais.

 

A la fois, introduction à une poésie en élaboration et Livre de ma Sortie au Jour, le Centre de Flammes donc, ainsi a petit à petit glissé dessous son objet sous le boutoir répété des “ refus ” pour finir par tout à fait se détacher de Girations et lui faire un parfait pendant… ; dérivé au hasard des portes se refermant… de plus en plus gros du ressentiment à chaque fois plus vaste à embrasser. Il s’y traite ainsi plus précisément et sur le mode autobiographique l’origine des vertiges que je me contentais seulement de retranscrire dans le recueil, double façon, bien présomptueuse, désormais ainsi à deux ouvrages, d’explorer la même obsession des manèges.

 

Poète, c’est une volupté qui m’a prise comme ça. Je n’ai pas cherché. Un mirage dense. Insistant, suie et suif. Une mauvaise fièvre… Ça vous émousse l’instinct de conservation… Voilà de possession un bien affligeant état qui ne s’exorcise paradoxalement que par l’entêtement à le porter jusqu’au bout ! Jusqu’au point de se prendre de plein fouet le réel. On a alors déjà perdu beaucoup de temps, d’amis, d’amours, d’argent et de santé. En rouets… cercles seulement, inutiles, dans le brouillard ignoble… 

J’abjure ici sincèrement. On m’en voudra pas ; je le fais encore littéralement à mes dépends. Moi « Maison ».

 

*

 

Girations fut mon tout premier et dernier truc lyrique. Je suis effectivement complètement revenu de la poésie.  Oh, il m’est arrivé de rechuter quelquefois à l’occasion de “ Fables actuelles ” et autres “ Délits de faciès ” que me commandait en face de l’actualité mon âme irréductible… et qui sont aussi, ” Fables actuelles ” et “ Délits de faciès “, dans Girations. Mais plus rien désormais dans la radicalité du délire…

J’ai exploré depuis des chemins de marge que je croyais plus pratiques et rigoureusement techniques de shifter le paradigme du profit. Plus de neuf nouvelles années, fasciné de nouvelles lunes et trompé de nouveaux moulins… Programmables, algorithmiques : fantastiques  rigoureux divins dynamos, des pas à pas, du cerveau moteur… récursivités… distributivité !

J’en reviens aussi.

Je m’apprête, perfectible, désormais à embrasser une décennie autrement directement plus dédiée au changement. Le cycle toujours. Autant de saisons peut-être dans la perfection du politique. Politique, ô panacée hystérique, le maelstrom en grand où tout finit au gouffre : gniouf ou fosse commune.

Avant cela, je devais sortir ce texte. Le recueil qu’il introduisait aussi… Ainsi que d’autres gribouillonneries mis plus de quinze années sous le boisseau parce que la caste éditrice n’y porta pas intérêt. Pas profit entrevu… 

Je publie tout ; absolument. Gloire pour moi seul ! Absolument tout. 

Tout sans le fignolage, les précautions, le crible, le simili. Tel quel dissemblé. Plein d’embages. Monstrueux. Pataud. Authentique. Oracle. Absolument impardonnable.

Un vrac d’avis. 

Du lot : des certitudes prétentieuses, si surprenemment d’actualité… sur l’art et le féminin, l’architecture et le vernaculaire, le nègre et la révolution, etc. De l’intuition bien précoce. De l’éthique tenace. Du technique autrement. De la vraie raideur intellectuelle… Babillage. Abscons sans doute, inutile peut-être, chimérique : paon et coq certainement… mais pour quoi je réclame le droit à l’existence. 

Qu’il décide le lecteur, nom de Dieu ! 

Je ne revendique que d’avoir pensé… et rêvé. À ma mesure seulement, global. À mes dépends strictement. L’ascèse rigoureuse et le famélique état. Pour le reste que juge qui veut. Il y a de quoi me  faire « Maison ». Aussi prends-je finalement l’indépendance que je me suis promise il y a dix ans. 

Qu’on saisisse aussi au hasard de ces pages qui je suis dans le fond. Que des gages ont été donnés. Que j’ai payé aussi quelque peu déjà. Que j’ai très peu à perdre. Par là que je suis légitime.

 

Mais la sortie du Centre de Flamme, ce qui la rend plus nécessaire est que j’en ai récemment découvert un sens nouveau. Son sens premier en réalité. Une femme. Que je n’ai cessé pourtant d’y apostropher, à qui il est adressé même. Mais dont je ne m’étais pas douté jusqu’ici de la relation si directe avec le titre… pour le concentré de chaleur et le repère qu’elle représente pour tant de gens…

Je le lui dédie finalement parfaitement. 

Girations, lui, est dédié à mon fils… et à Coltan qui finit par arriver. Toujours cachée derrière son frère, Coltan… Et à vous tous. Et à chacun particulièrement bien intentionnellement, pour tout ce que j’ai manqué, pour tout ce à quoi j’aurais pu manquer.

 

 

Le Centre de Flammes

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